https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/08/04/climat-les-promesses-de-l-ia-grevees-par-un-lourd-bilan-carbone_6266586_3244.html

L’intelligence artificielle (IA) est-elle davantage un remĂšde qu’un poison climatique ? Les gĂ©ants de la tech, de Google Ă  Microsoft, le clament haut et fort : les apports de ces technologies pour dĂ©carboner les Ă©conomies et s’adapter au rĂ©chauffement seront Ă  terme majeurs. A l’inverse, nombre d’experts prĂ©viennent que ces gains restent hypothĂ©tiques. L’empreinte carbone et la consommation Ă©lectrique de services comme ChatGPT, d’ores et dĂ©jĂ  importantes, risquent de devenir colossales. Ils appellent Ă  la mesure face Ă  une solution « utile » mais pas « miracle ».

Une meilleure connaissance du climat L’IA est considĂ©rĂ©e comme un outil efficace pour mieux comprendre le changement climatique et rĂ©pondre aux incertitudes qui persistent. Elle est de plus en plus utilisĂ©e dans les prĂ©visions mĂ©tĂ©orologiques, comme s’y emploie le Centre europĂ©en pour les prĂ©visions mĂ©tĂ©orologiques Ă  moyen terme (ECMWF), et pour les simulations du climat du futur. Google Research a ainsi dĂ©voilĂ©, le 22 juillet, dans la revue britannique Nature, une nouvelle approche, NeuralGCM, mĂ©langeant IA et modĂšles climatiques fondĂ©s sur la physique, afin de simuler la mĂ©tĂ©o et le climat de la Terre jusqu’à 3 500 fois plus vite que d’autres modĂšles et de maniĂšre autant, voire plus, prĂ©cise sur une majoritĂ© de paramĂštres.

L’IA sert aussi Ă  mieux anticiper les Ă©vĂ©nements extrĂȘmes, notamment « les incendies, les avalanches ou la trajectoire et les changements brusques d’intensitĂ© des cyclones », explique Claire Monteleoni, titulaire de la chaire Choose France AI et directrice de recherche Ă  l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numĂ©rique (Inria). Dans le cadre du projet de recherche europĂ©en Xaida, le climatologue Pascal Yiou fait, quant Ă  lui, appel Ă  l’IA pour savoir si ces catastrophes sont dues au changement climatique d’origine humaine – ce que l’on appelle la science de l’attribution.

Il utilise aussi l’IA pour prĂ©dire la survenue d’évĂ©nements rares, comme des canicules historiques, afin de mieux prĂ©parer la sociĂ©tĂ©. « Nous avons, par exemple, rĂ©alisĂ© 10 000 simulations de l’été 2024 pour savoir ce qui pouvait arriver », explique le directeur de recherche au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement. L’exercice a pris une semaine pour former l’IA puis une dizaine de minutes pour produire des rĂ©sultats. Deux ou trois mois auraient Ă©tĂ© nĂ©cessaires avec des modĂšles de climat qui tournent sur des supercalculateurs. « L’IA nous permet de tester davantage d’hypothĂšses et de rĂ©pondre Ă  des questions de recherche jusqu’à prĂ©sent inaccessibles », juge M. Yiou.

Des solutions pour rĂ©duire les Ă©missions de CO2 L’IA commence Ă  ĂȘtre utilisĂ©e pour accĂ©lĂ©rer la transition Ă©cologique. « Elle est bien adaptĂ©e, car les problĂ©matiques du climat sont complexes et multifactorielles, donc difficiles Ă  gĂ©rer », estime Gilles Babinet, coprĂ©sident du Conseil national du numĂ©rique et auteur de Green IA. L’intelligence artificielle au service du climat (Odile Jacob, ‎224 pages, 22,90 euros).

Mme Monteleoni explique collaborer avec EDF « pour mieux comprendre oĂč installer des Ă©oliennes en fonction des modifications des vents liĂ©s au changement climatique ». L’IA peut aider Ă  optimiser les rĂ©seaux Ă©lectriques, responsables d’un quart des Ă©missions mondiales de gaz Ă  effet de serre, « en sachant prĂ©dire oĂč c’est ensoleillĂ© ou venteux dans les jours qui viennent, afin de maximiser la production de renouvelables et moins s’appuyer sur d’autres sources d’énergie plus sales », poursuit-elle.

Les autres exemples d’usages sont lĂ©gion : observer et inventorier les Ă©missions de millions de sites polluants Ă  travers le globe et traquer la dĂ©forestation, dĂ©velopper de nouveaux matĂ©riaux, par exemple de meilleurs composants de batteries, optimiser les systĂšmes de chauffage et de climatisation dans les bĂątiments, amĂ©liorer l’agriculture de prĂ©cision, pour limiter les intrants ou l’irrigation, comme les recense une vaste Ă©tude, publiĂ©e en 2022, par une vingtaine d’universitaires et d’experts de la tech, dont Google.

« Nous voyons l’IA comme une occasion pour le climat », rĂ©sume Adam Elman, responsable du dĂ©veloppement durable pour l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient chez Google. Parmi ses services, il cite Google Maps, qui, grĂące aux donnĂ©es sur la topologie ou le trafic routier, « propose des itinĂ©raires qui minimisent l’utilisation de carburant ». « Depuis 2021, cela a Ă©vitĂ© 2,9 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent de 660 000 voitures retirĂ©es de la route par an », assure-t-il. Les thermostats Nest, de Google, qui peuvent contrĂŽler automatiquement le chauffage et la climatisation d’un domicile, auraient, eux, permis d’économiser 7 millions de tonnes de CO2, toujours selon l’entreprise. Le groupe a Ă©galement effectuĂ© des tests pour rĂ©duire, grĂące Ă  l’IA, les traĂźnĂ©es de condensation des avions, qui aggravent le rĂ©chauffement climatique.

Quel pourrait ĂȘtre l’impact pour le climat de l’ensemble de ces pistes ? Il n’existe pas de chiffres ayant fait l’objet d’études approfondies. Les solutions liĂ©es Ă  l’IA, si elles Ă©taient mises en Ɠuvre largement, pourraient rĂ©duire les Ă©missions de CO2 mondiales de 5 % Ă  10 %, d’ici à 2030, assure un rapport du Boston Consulting Group commandĂ© par Google. Mais cette estimation n’est qu’une simple extrapolation Ă  partir d’un article de 2021 racontant quelques cas de clients du cabinet de conseil. Un rapport de PwC sur quatre secteurs, financĂ© par Microsoft en 2019, avançait, lui, une fourchette de baisse de 1,5 % Ă  4 %, d’ici à 2030. Des chiffres que remet en cause Hugues Ferreboeuf, spĂ©cialiste du numĂ©rique au cercle de rĂ©flexion The Shift Project : « Toutes les approches sĂ©rieuses mettent en avant l’impossibilitĂ© de gĂ©nĂ©raliser Ă  partir de cas d’étude spĂ©cifiques. »

Une empreinte carbone en pleine expansion L’enjeu est de taille, car l’IA a d’ores et dĂ©jĂ  un coĂ»t environnemental important : celles gĂ©nĂ©ratives, capables de crĂ©er des textes, des images ou des vidĂ©os, nĂ©cessitent Ă©normĂ©ment de calcul informatique, lors de la phase d’entraĂźnement mais surtout d’utilisation. Une requĂȘte sur un assistant comme ChatGPT consomme dix fois plus d’électricitĂ© qu’une recherche sur Google, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE).

Selon l’organisation non gouvernementale (ONG) Data For Good, spĂ©cialisĂ©e dans la production de donnĂ©es sur les technologies, 100 millions d’utilisateurs de la derniĂšre version de ChatGPT, avec une conversation par jour, Ă©mettraient autant de CO2 en un an que de 100 000 à 364 000 Français. Or, ce type d’assistants d’IA est en cours de dĂ©ploiement sur le moteur de recherche de Google, les rĂ©seaux sociaux de Meta, les smartphones Apple ou Samsung
 Les centaines de milliards d’euros investis dans les centres de donnĂ©es par les gĂ©ants du numĂ©rique, en grande partie pour rĂ©pondre aux besoins de l’IA, ont d’ores et dĂ©jĂ  fait bondir leurs Ă©missions de CO2, en raison de la construction des bĂątiments et de la fabrication des processeurs : en 2023, + 30 % pour Microsoft et + 13 % pour Google (+ 50 % depuis 2019).

Ce dĂ©crochage liĂ© Ă  l’IA remet-il en cause l’objectif de « zĂ©ro carbone en 2030 » fixĂ© par Microsoft ou Google ? « Nous sommes trĂšs engagĂ©s dans la poursuite de cet objectif », assure M. Elman, de Google, tout en soulignant que ce but est « trĂšs ambitieux et difficile Ă  atteindre ». Les gĂ©ants du numĂ©rique misent sur leurs achats d’énergies renouvelables et leurs efforts d’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique pour y parvenir.

« Nous pensons que les bĂ©nĂ©fices de l’IA pour le climat vont significativement dĂ©passer les aspects nĂ©gatifs », assure surtout M. Elman, de Google, comme les dirigeants de Microsoft. L’IA ne serait responsable que d’environ 0,01 % des Ă©missions mondiales, selon un article cosignĂ© par des experts de Microsoft, qui ont appuyĂ© leur calcul sur la consommation Ă©lectrique des processeurs rĂ©servĂ©s Ă  l’IA en 2023.

Ces estimations sont contestables, rĂ©torque M. Ferreboeuf, du Shift Project : « D’ici Ă  trois ans, la part de l’IA va passer de 8 % Ă  45 % dans la consommation Ă©lectrique des centres de donnĂ©es, qui va doubler », explique-t-il, citant des chiffres du cabinet SemiAnalysis. En 2026, l’IA pourrait donc reprĂ©senter environ 0,9 % des Ă©missions mondiales et les centres de donnĂ©es environ 2 % [contre 0,6 % en 2020], selon l’AIE, estime-t-il. « De plus, le raisonnement en pourcentage n’est pas pertinent, insiste l’expert. Ce qu’il faut, c’est savoir si les Ă©missions absolues baissent de 5 % Ă  7 % par an, comme le prĂ©voit l’accord de Paris. »

« C’est trĂšs dur d’avoir un dĂ©bat sur le bilan de l’IA » en raison du « manque de chiffres Ă©tayĂ©s », dĂ©plore Sasha Luccioni, spĂ©cialiste de la consommation Ă©lectrique Ă  la start-up d’IA Hugging Face. Elle pointe de plus le risque d’un « effet rebond » qui contrebalance les gains d’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique en faisant augmenter les usages. Et note qu’il faudrait aussi intĂ©grer les activitĂ©s carbonĂ©es que l’IA favorise, comme l’extraction pĂ©troliĂšre : TotalEnergies a nouĂ© un partenariat avec Google et Exxon Mobil avec Microsoft


Une consommation Ă©lectrique croissante Au-delĂ  des Ă©missions de CO2 des centres de donnĂ©es, leur consommation Ă©lectrique croissante suscite des inquiĂ©tudes : elle pourrait plus que doubler, d’ici à 2026, et passer de 1,7 % Ă  entre 2 % et 3,5 % de la demande mondiale, selon les estimations de l’AIE, qui y inclut les cryptomonnaies. Outre des problĂšmes liĂ©s Ă  l’eau utilisĂ©e pour refroidir les processeurs, cette expansion fait craindre des pĂ©nuries locales d’électricitĂ© ou des conflits d’usages, par exemple avec les voitures Ă©lectriques.

De plus, pointe M. Ferreboeuf, il y a un risque d’accaparement des ressources limitĂ©es en Ă©nergies renouvelables : Amazon, Meta, Google et Microsoft ont, Ă  eux seuls, achetĂ© 29 % des nouveaux contrats d’éolien et de solaire dans le monde, en 2023, selon Bloomberg.

Sur les perspectives Ă  long terme, certains apĂŽtres de l’IA assument une explosion des besoins. « L’IA nĂ©cessitera de produire le double de l’électricitĂ© disponible dans le pays, vous imaginez ? », vient de prĂ©venir le candidat Ă  la prĂ©sidentielle amĂ©ricaine Donald Trump. « Il n’y a pas moyen [de couvrir les besoins Ă©nergĂ©tiques de l’IA] sans une avancĂ©e scientifique », avait dĂ©jĂ  prophĂ©tisĂ©, en janvier, Sam Altman, le fondateur d’OpenAI, espĂ©rant des percĂ©es dans la fusion nuclĂ©aire, vue comme une « énergie propre et illimitĂ©e ».

Vers une autre IA ? « L’IA gĂ©nĂ©rative incarne le technosolutionnisme, ou le mythe de la technologie qui va nous sauver », dĂ©plore Lou Welgryn, coprĂ©sidente de Data For Good. PrĂ©senter l’IA comme une solution Ă  la crise environnementale risquerait de dissuader la sociĂ©tĂ© d’agir et d’aller vers davantage de sobriĂ©tĂ©. L’argument servirait aussi Ă  verdir l’image d’une technologie qui, pourtant, « met sous stĂ©roĂŻdes notre Ă©conomie actuelle, trĂšs carbonĂ©e » et favorise la croissance, la publicitĂ© et la surconsommation, regrette-t-elle.

L’urgence serait de questionner les usages de l’IA, notamment gĂ©nĂ©rative. Et mĂȘme d’y renoncer dans certains cas. Le rĂ©fĂ©rentiel publiĂ© fin juin par l’organisme de certification Afnor invite ainsi Ă  prĂ©fĂ©rer, si possible, « une autre solution moins consommatrice pour rĂ©pondre au mĂȘme objectif ». Et Ă  privilĂ©gier une « IA frugale ». Le principe est lĂ  de recourir Ă  des modĂšles d’IA moins puissants ou moins gĂ©nĂ©ralistes pour traiter les requĂȘtes les plus simples ou des usages plus spĂ©cifiques.

« Entre le technosolutionnisme et la dĂ©croissance, il y a une troisiĂšme voie possible », pense M. Babinet. Selon lui, il faut encourager les usages utiles de l’IA, qui, souvent, ne nĂ©cessitent pas d’IA gĂ©nĂ©rative, et « dĂ©courager » les usages futiles et gourmands en calcul, comme la gĂ©nĂ©ration d’images sur les rĂ©seaux sociaux. « Il faut donc faire payer le vrai prix de l’environnement », poursuit-il, proposant d’intĂ©grer les services numĂ©riques comme l’IA dans le mĂ©canisme d’ajustement carbone aux frontiĂšres par lequel l’UE va taxer des produits en fonction de leurs Ă©missions de CO2.

Sasha Luccioni ou FrĂ©dĂ©ric Bordage, de l’ONG Green IT, souhaitent, eux, la crĂ©ation d’une sorte « d’écoscore » qui, Ă  la maniĂšre du Nutri-Score pour les aliments, ferait la transparence sur les coĂ»ts environnementaux des modĂšles d’IA, afin d’orienter les usages. Dans cet esprit, l’Afnor a Ă©noncĂ© des mĂ©thodologies de calcul pour mesurer l’impact environnemental de l’IA, afin de communiquer « avec des allĂ©gations justes et vĂ©rifiables ». Et « sans greenwashing », prĂ©cise le communiquĂ©.

Audrey Garric et Alexandre Piquard

  • Wi(vΛ)lem Ort(Λv)iz@jlai.lu
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    1 month ago

    J’avais pas l’intention de commenter, mais il faut quand mĂȘme dire que ta lecture de la citation sur l’ “entitĂ© divine” est extrĂȘmement biaisĂ©e, puisque tu n’es pas mĂȘme plus capable de dĂ©celer une figure de style, ni d’avoir le recul critique sur le climat gĂ©nĂ©ral au sujet de l’IA (qui en fait effectivement une forme d’incantation) :

    On part de la pensĂ©e magique, la barre est basse les copains. Donc oui, les IAs, c’est pas arrivĂ© par intervention divine,

    Sur le reste, je trouve que certains de tes arguments sont intĂ©ressants sur le coĂ»t de l’entraĂźnement mis en rapport avec le fonctionnement du code et la disponibilitĂ© des modĂšles, mais tout ça est noyĂ© dans un techno-solutionnisme que tu refuses d’admettre, et ça dĂ©crĂ©dibilise le reste.

    • keepthepace@slrpnk.net
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      1 month ago

      Je comprends la figure de style, elle signifie qu’on part de la position “je sais pas comment ça marche”. Comme je le dis, la barre de dĂ©part est basse.

      Pour le reste, je vous laisse choisir mon Ă©tiquette, j’explique mes positions, je dĂ©taille mes calculs, si c’est devenu techo-solutioniste de penser qu’une tech puisse amĂ©liorer le monde comme des milliers l’ont fait avant elle et ce d’autant plus si elle est open-source, je prends cette Ă©tiquette avec joie. Je trouve juste dommage qu’entre technophobe et technosolutionniste, il n’y ait aucun espace disponible.

      • Camus [il/lui]@lemmy.ca
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        1 month ago

        J’interviens dans le fil maintenant, merci pour la qualitĂ© de tes interventions. Personnellement j’avais l’impression que tu avais bien compris la figure de style.

        Je trouve juste dommage qu’entre technophone et technosolutionniste, il n’y ait aucun espace disponible.

        J’espĂšre qu’il en reste, mais bon, chacun utilise ses propres catĂ©gories

      • Wi(vΛ)lem Ort(Λv)iz@jlai.lu
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        1 month ago

        “je sais pas comment ça marche”

        Oui, donc c’est ce que je dis, tu laisses complĂštement de cĂŽtĂ© le fait que le recours Ă  l’IA dans tout et n’importe quoi est une forme d’incantation gĂ©nĂ©rale. Donc on ne comprend pas la figure de style de la mĂȘme façon. Et tu fais exactement pareil d’ailleurs, en t’enfermant toi-mĂȘme dans des promesses d’amĂ©liorer radicalement le monde, la dĂ©mocratie ou encore de nous libĂ©rer du travail (on attend depuis un siĂšcle que le progrĂšs mĂ©canique le fasse, mais bizarrement c’est pas arrivĂ© exactement comme on le pensait
).

        Je trouve juste dommage qu’entre technophobe et technosolutionniste, il n’y ait aucun espace disponible.

        Et voila, maintenant ce sont les gens qui te critiquent qui sont des rĂ©ducteurs binaires
 Si tu ne veux pas ĂȘtre rĂ©duit Ă  un de ces deux extrĂȘmes, c’est simple, ne fait pas de promesses de sauver le monde avec l’IA (voir aussi tes anciens posts et AMA). Pour ma part je pense qu’il y a un entre deux, entre technophobe et technosolutionniste, mais je ne te classe pas dedans. Et ton refus du terme “gourmand en Ă©nergie” pour le processus de dĂ©veloppement d’IA, juste sur la base que ça consomme beaucoup seulement au dĂ©part et moins que d’autres, est un bon exemple de ton biais un peu trop Ă©vident pour moi.
        AprĂšs chacun ses dĂ©finitions, mais tu as quand mĂȘme une sacrĂ© mauvaise foi par moment.

        • Camus [il/lui]@lemmy.ca
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          1 month ago

          nous libĂ©rer du travail (on attend depuis un siĂšcle que le progrĂšs mĂ©canique le fasse, mais bizarrement c’est pas arrivĂ© exactement comme on le pensait
).

          Sur ce point précis, il y a répondu dans un autre commentaire

          Et bien souvent, presque systĂ©matiquement mĂȘme, ce qui est critiquĂ© Ă  travers la techno, c’est le capitalisme. Je prĂ©fĂ©rerais nettement que ces journalistes assument l’angle anti-capitaliste plutĂŽt que de reporter sur la tech des choses Ă  laquelle elle ne peut rien. Pour prendre un exemple d’il y a quelques annĂ©es, c’est pas la haute technologie qui force des gamins Ă  bosser dans des mines de cobalt. Le cobalt ne perd pas ses propriĂ©tĂ©s chimiques s’il est ramassĂ© par des travailleurs majeurs, syndiquĂ©s, correctement payĂ©s et Ă©quipĂ©s. De la mĂȘme façon, les datacenters consomment de l’électricitĂ© (surtout aux US). C’est pas la haute technologie qui dĂ©cide de oĂč installer les serveurs. C’est pas la haute technologie qui dĂ©cide du mix Ă©lectrique US et de ses Ă©missions de CO2.

          https://jlai.lu/comment/8922647

        • keepthepace@slrpnk.net
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          1 month ago

          tu laisses complĂštement de cĂŽtĂ© le fait que le recours Ă  l’IA dans tout et n’importe quoi est une forme d’incantation gĂ©nĂ©rale

          J’ai pourtant l’impression de lutter directement contre ça en demandant qu’on ait une comprĂ©hension plus profonde et une vue plus nuancĂ©es des problĂšmes et des avantages de ces techs. C’est en refusant la complexitĂ© d’un sujet qu’on peut l’utiliser de façon incantatoire. Rentre dans les dĂ©tails et la manipulation avec des formules simplistes devient plus difficile.

          Alors d’accord, cet article a le mĂ©rite de passer de “c’est pas magique, c’est des infrastructures”, ce qui est sĂ»rement nĂ©cessaire pour certains, mais je trouve qu’on est aussi en droit de demander Ă  ce que l’analyse ne s’arrĂȘte pas Ă  cette Ă©tape qui reste quand mĂȘme trĂšs simpliste, mĂȘme si moins simpliste que ce qu’elle dĂ©construit.

          Et tu fais exactement pareil d’ailleurs, en t’enfermant toi-mĂȘme dans des promesses d’amĂ©liorer radicalement le monde, la dĂ©mocratie ou encore de nous libĂ©rer du travail

          Je ne demande qu’à dĂ©tailler ces promesses, je le fais un peu lĂ .

          Et note qu’il n’y a pas que des promesses en la matiĂšre. De nombreuses amĂ©liorations radicales ont Ă©tĂ© amenĂ©es par le deep learning ces 10 derniĂšres annĂ©es: on a rĂ©solu le problĂšme de la traduction automatique. De la transcription automatique. Des non-programmeurs peuvent gĂ©nĂ©rer des programmes simples juste en le demandant. Ces technos boostent Ă©galement la recherche de diffĂ©rentes façons. La capacitĂ© de gĂ©nĂ©rer des programmes simples accĂ©lĂšre grandement l’analyse de donnĂ©es. La gĂ©nĂ©ration de texte (bien utilisĂ©e, relue par des humains) accĂ©lĂšre la gĂ©nĂ©ration de publis et la recherche documentaire. On a rĂ©solu le problĂšme de repliement des protĂ©ines, qui a lui seul est une Ă©norme avancĂ©e qui aurait fait la une de plein de journaux scientifiques pendant des mois si ce n’était pas une des nombreuses avancĂ©es du machine learning. On dĂ©code le langage des baleines, on amĂ©liore les simulation de plasmas de fusion, on dĂ©couvre des planĂšte grĂące Ă  ces techniques. Je m’arrĂȘte lĂ , mais les avancĂ©es sont rĂ©elles.

          DĂ©mocratie: LĂ  ce n’est encore qu’une promesse, et en fait, mĂȘme pas une promesse, un espoir qui demande Ă  ce qu’on s’empare collectivement de ces techs au lieu de les laisser entre des mains capitalistes et autoritaires. Des agents basĂ©s sur LLM ont la capacitĂ© de digĂ©rer beaucoup de donnĂ©es lĂ©gales, Ă©conomiques, politiques et d’agir comme des reprĂ©sentants fidĂšles, incorruptibles, honnĂȘtes et transparents des citoyens. Fais toi une discussioon d’une heure avec un tel agent, dĂ©taillant tes opinions sur les diffĂ©rents sujets politiques et laisse le ensuite te reprĂ©senter, trouver les compromis acceptables, les positions de vote sur toutes les questions locales, nationales ou autres et je pense en effet que la dĂ©mocratie changera de tĂȘte.

          LibĂ©rer du travail: C’est pas une hypothĂšse et c’est pas une question technique, c’est une critique faite Ă  l’“IA” aujourd’hui et une constatation faite par de nombreux journalistes (j’avoue que je suis pas allĂ© la vĂ©rifier personnellement, mais je la trouve crĂ©dible): l’IA dĂ©truit des emplois. Autrement dit, plein de boites se rendent compte qu’elles peuvent produire la mĂȘme chose avec moins d’humains.

          LĂ  pour le coup je trouve ça un peu rude de dire que j’ai une position technosolutioniste sur la question, tant je dis et rĂ©pĂšte que c’est une question politique et culturelle de passer de la vision “destruction d’emploi” Ă  “transition vers une sociĂ©tĂ© post-travail”. La sociĂ©tĂ© post-travail, Ă  mon avis, elle Ă©tait faisable avec la techno des annĂ©es 90. Elle est d’autant plus faisable aujourd’hui. Alors oui, je pense que les avancĂ©es technologiques rendent cette Ă©volution plus Ă©vidente, plus inĂ©vitable, et la marche moins haute, mais comme on dit, on fait pas boire un Ăąne qui n’a pas soif, la question est avant tout culturelle.

          (on attend depuis un siĂšcle que le progrĂšs mĂ©canique le fasse, mais bizarrement c’est pas arrivĂ© exactement comme on le pensait
).

          Le temps de vie passĂ© Ă  travailler baisse rĂ©guliĂšrement depuis la rĂ©volution industrielle pourtant. Et le travail purement physique, purement mĂ©canique, oĂč seule la force physique est nĂ©cessaire Ă  une tĂąche, a quasimment complĂštemetn disparu.

          Si tu avais Ă©coutĂ© d’autres personnes que les “incantateurs”, des gens avec une analyse un peu plus dĂ©taillĂ©e de la baisse du travail par la mĂ©canisation, tu aurais constatĂ© qu’ils ne parlaient pas d’une sortie du travail mais d’une migration vers le tertiaire, cible de l’automatisation actuelle. Une fois les 3 secteurs automatisĂ©s par contre, plus de migration possible, on sort du travail. Si on le veut. Si on rĂ©siste ĂĄ la tentation de crĂ©er des bullshit jobs par peur du changement.

          Si tu ne veux pas ĂȘtre rĂ©duit Ă  un de ces deux extrĂȘmes, c’est simple, ne fait pas de promesses de sauver le monde avec l’IA

          Je suis optimiste et utopiste, je pensais que ces Ă©tiquettes lĂ  suffisaient, mais si vous trouvez raisonnable de me dire techno-solutionniste parce que je trouve que certains problĂšmes ont des solutions techniques, c’est vous qui voyez, mais venez pas gueuler quand perso j’applique ma dĂ©finition de la technophobie qui moi me semble raisonnable: le fait d’adopter une position critique de la tech avant de chercher Ă  la comprendre.

          Y a plein de critiques lĂ©gitimes des LLMs, de l’IA en gĂ©nĂ©ral, dont beaucoup viennent des chercheurs dans le domaine. Celle lĂ , elle me dĂ©range pas et le dĂ©bat est non seulemet lĂ©gitime mais super important! J’aimerais que la population gĂ©nĂ©rale y participe plus, c’est dangereux qu’elle soit confinĂ©e au cercle des chercheurs et arbitrĂ©e par quelques CEOs. Mais les critiques faits sur des problĂšmes imaginaires je les mets pas dans la mĂȘme catĂ©gorie en effet.

          Et ton refus du terme “gourmand en Ă©nergie” pour le processus de dĂ©veloppement d’IA, juste sur la base que ça consomme beaucoup seulement au dĂ©part et moins que d’autres, est un bon exemple de ton biais un peu trop Ă©vident pour moi.

          Le refus de parler en Wh plutĂŽt qu’en terme vagues de “gourmand”, “beaucoup”, “beaucoup plus”, “beaucoup trop” me parait ĂȘtre de plus mauvaise foi.

          Voici une affirmation claire, falsifiable que je vous invite Ă  contredire: l’entrainement de modĂšles de langages tel que fait aujourd’hui, avec les datacenters actuels, aurait un impact nul sur le climat dans une sociĂ©tĂ© qui a fait sa transition Ă©nergĂ©tique.

          • Wi(vΛ)lem Ort(Λv)iz@jlai.lu
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            1 month ago

            Des agents basĂ©s sur LLM ont la capacitĂ© de digĂ©rer beaucoup de donnĂ©es lĂ©gales, Ă©conomiques, politiques et d’agir comme des reprĂ©sentants fidĂšles, incorruptibles, honnĂȘtes et transparents des citoyens. Fais toi une discussioon d’une heure avec un tel agent, dĂ©taillant tes opinions sur les diffĂ©rents sujets politiques et laisse le ensuite te reprĂ©senter, trouver les compromis acceptables, les positions de vote sur toutes les questions locales, nationales ou autres et je pense en effet que la dĂ©mocratie changera de tĂȘte.

            Voila exactement le genre de croyance qui dĂ©finit ce que j’appelle du technosolutionnisme. Chacun se fera un avis sur cette promesse, moi je constate surtout que cette façon d’analyser la rĂ©alitĂ© te donne des rĂ©sultats totalement en dĂ©calage avec ce que tu appelles les “ressentis” quand ça te fait dire, par exemple, que le mandat de Hollande a rĂ©duit les inĂ©galitĂ©s malgrĂ© sa loi travail qui a dĂ©truit le code du travail. Mais comme t’es ingĂ© bien payĂ©, ton “agent LLM” peut te raconter que la vie s’amĂ©liore sur la base d’un tableau INSEE, et ça te convient


            Le temps de vie passĂ© Ă  travailler baisse rĂ©guliĂšrement depuis la rĂ©volution industrielle pourtant. Et le travail purement physique, purement mĂ©canique, oĂč seule la force physique est nĂ©cessaire Ă  une tĂąche, a quasimment complĂštemetn disparu.

            Ça se voit que c’est pas toi qui fait la mise en rayon Ă  Lidl et le mĂ©nage dans les bureaux.

            • keepthepace@slrpnk.net
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              1 month ago

              Haha, oui, j’appelle “ressentis” les choses que les gens pensent ĂȘtre vrai instinctivement (comme la hausse de l’insĂ©curitĂ©) et “faits” les choses mesurĂ©es objectivement. C’est la base de la science ça.

              Ça se voit que c’est pas toi qui fait la mise en rayon Ă  Lidl et le mĂ©nage dans les bureaux.

              Ça se voit que c’est pas toi qui a eu Ă  dĂ©charger Ă  la main des camions remplis de sacs de 50 kg de ciment. C’est pas moi non plus hein. C’est mon grand pĂšre, qui se plaignait de la facilitĂ© du travail “ouvrier” quand il visitait un atelier oĂč on utilise un transpalette dĂ©s qu’il faut dĂ©charger quelque chose.

              Le travail reste physique, mais ce n’est plus un travail en force, qui a Ă©tĂ© remplacĂ©e par la force mĂ©canique.

              Mais on a déjà eu cette conversation, on va pas la refaire